« UQO is watching you » – La saga se poursuit
Les plus nostalgiques de 2014 se souviendront qu’il y avait, cette année-là à l’UQO, toute une campagne médiatisée sur la question du nouveau règlement concernant l’utilisation des ressources informatique de l’université (ordinateurs, réseau WIFI, Internet…). Menée conjointement par l’AGE-UQO et le Syndicat des professeur(e)s de l’UQO (SPUQO), cette campagne a depuis été mise de côté par l’association étudiante, suite au dépôt formel d’un grief à la Commission des relations de travail par la SPUQO qui tranchera sur la question prochainement. Nous avons rencontré Louise Briand, Présidente du SPUQO, pour en apprendre un peu plus sur un litige qui nous concerne tous.
Un règlement controversé
Le règlement en question, soit le « Règlement relatif à l’utilisation des ressources informatiques et de télécommunications » a été entériné par le conseil d’administration de l’UQO en 2011. Dès son introduction, le SPUQO y a vu « certains problèmes majeurs, notamment parce qu’il autorise une seule personne […] à savoir le Vice-recteur à l’administration et aux ressources, à aller à la pêche [dans les courriels, bases de données, fichiers que l’on conserve sur le réseau]» nous raconte Louise Briand.
Même les plus intimes de nos « textos » peuvent être scrutés. Mme Briand, étant elle-même professeure, doit effectuer des recherches dans le cadre de ses fonctions où elle interroge des individus à qui elle promet la plus stricte confidentialité de leurs propos. C’est une règle formelle, d’ailleurs, en éthique de la recherche. Le règlement viendrait compromettre cette confidentialité, dans la mesure où il permet à la haute direction de fouiller dans les données personnelles sans le consentement des personnes concernées et sans mandat d’un tribunal advenant qu’il soit question d’une enquête sur un acte illicite. Outre la menace potentielle pour la recherche, d’autres problèmes peuvent surgir. Certains professeur(e)s s’inquiètent que les données qu’ils produisent ne leur soient dérobées ou utilisées sans égard à la propriété intellectuelle, qui leur revient de droit, sur leurs recherches. Il y aurait, selon leur syndicat, des risques pour la liberté d’expression et pour la réputation de l’UQO et de ses chercheurs. D’autres questions surgissent quand on se réfère à la Loi sur l’accès à l’information. Serait-il possible, qu’en vertu de cette loi, une entreprise privée puisse avoir accès aux données recueillies, par exemple, lorsqu’elle embaucherait un nouvel employé diplômé et ancien étudiant de l’UQO? « Les demandes d’accès sont soumises à cette loi, mais des questions se posent » nous répond la présidente du syndicat. C’est cet accumulation d’éléments de flou juridique et d’inquiétudes qui a mené le syndicat des professeur(e)s à déposer formellement un grief à la Commission des relations de travail du Québec en 2011. Les parties sont en médiation depuis. Du côté de la haute direction et du recteur de l’université, on ne nous a pas répondu aux demandes d’entrevue.
Des solutions?
Une première audition a été reçue à la CRT le 20 avril 2012, l’UQO alors en pleine crise étudiante. Le SPUQO avait offert plusieurs propositions d’amendement au règlement qui ont été rejeté « du revers de la main » nous explique Mme Briand, dont voici les grandes lignes qui suivent. D’abord, en l’absence de modalités d’application, le regroupement propose qu’il y ait un article définissant les modalités d’utilisation du règlement. On y suggère aussi de tenir compte des droits et devoirs de chaque partie concernée, le droit à la vie privée et le droit d’auteur entre autre, afin de respecter les exigences éthiques de la recherche. De plus, leurs recommandations évoque comme conseil de retirer du règlement les normes déjà couvertes par d’autres règlements, par exemple, celui concernent l’intimidation (incluant la « web-intimidation »). Enfin, le syndicat propose aussi qu’on se penche d’avantage sur le cas des services STI (Spécification technique d’interface), à savoir selon eux, que les risques les plus dommageables, pour le réseau intranet, sont souvent le fait des professionnels spécialistes du risque en question. Selon le SPUQO, l’UQO serait, par ailleurs, déjà protégée d’un éventuel usage illégal de ses ressources informatiques par la Loi québécoise concernant le cadre juridique des technologies de l’information, aux articles 22 et 36.
La suite
D’autres griefs auraient été déposés par le syndicat, nous informe Mme Briand, portant sur des fouilles de postes de travail. Des courriels auraient été interceptés et même les vidanges de certains enseignants scrutées puis jetées, alors que les enseignants sont responsables de jeter eux-mêmes leurs vidanges. « Est-ce qu’on en est rendu là (…), une direction qui nous fouille pis qui nous chasse tout le temps? Si c’est ça, je trouve que c’est vraiment triste, surtout dans une université où il y a des débats qui devraient avoir cour librement. C’est incroyable qu’on en soit rendu là (…) j’espère que ce n’est pas le cas » affirme Louise Briand en fin d’entrevue.
Les parties seront soumises à l’arbitrage cet automne ou, au plus tard, ce printemps pour trancher sur ce litige. À suivre…